Poèmes de Busenello
Il
viaggio d’Enea all’inferno Acte II, scène
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Campi Elisi Champs
Élysées.
La Musica. La
Musique
La Musica La
Musique
Delle sfere i concenti,
Les concerts des sphères
E le armonie de’
numeri sonori, Et
l’harmonie des nombres sonores
Compongono
nell’alme Composent
dans les esprits
Divini affetti
ed immortali amori. Des
sentiments divins et des amours immortelles.
Sinfonia,
melodia, Symphonies,
mélodies,
Alle glorie
infinite apre la via. Vous
ouvrez la voie aux gloires infinies.
Soavità spirante Cette
douceur qui expire
Dal vagheggiar
d’un’anima canora, Du
désir d’une âme musicienne,
Rassomiglia a
quel moto Ressemble
à ce mouvement
Che le menti
impassibili innamora. Qui
énamoure les esprits impassibles.
Un brillante
passaggio Le
voyage montre
Di pervenir al
Ciel mostra il viaggio. Un
brillant passage pour parvenir au Ciel.
Il
viaggio d’Enea all’inferno Intermède
O quanta sete, o
quanta, Oh
quelle soif ! Quelle soif !
O che pene, o
che guai, Oh
quelle peine, quels tourments !
Sempre sete
patir né bever mai. Souffrir
toujours de la soif et ne jamais boire.
La sete che
m’annoia La
soif qui me tourmente
È più grande di
me ; Est
plus grande que moi ;
Come mai
vincerola, Comment
pourrais-je la vaincre,
Son ubriaco oimè. Je
suis ivre hélas.
O che delizia è abbracciar Lieo Oh quel délice que d’embrasser Bacchus
E bere un fiasco
pien di Vicentino, Et
boire une fiasque de vin de Vicence,
Ma mischiar non
bisogna umore acquatico Mais
il ne faut point mêler l’eau
Nel perfetto
Malvatico Au
parfait vin Malvatico.
Mi piace il piccante, il dolce
porta J’aime
le pétillant, dont la douceur
Le lusinghe
amorose al mio palato. Suscite
dans ma bouche les plaisirs de l’amour.
I garbi, i
pizzicanti ambrosia stillano Les
vins aimables et pétillants distillent du nectar
E dentro al cor
mi brillano. Et
frétillent dans mon cœur.
Come mai si
potrebbe Comment
donc pourrait-on
Rappresentar la
erutazion in musica Représenter
l’éructation en musique
E far sì che i
deliri espriman il diexi ? Et
faire que les délires expriment les dièses ?
Come mai si può
bere in sesqui altera Comment
peut-on boire en sesqui-altère
E all’ebrietà
fondar basso continuo ? Et
sur l’ébriété fonder la basse continue ?
La cantatrice
Qual novella
armonia ? Forse l’Idea Quelle
est cette nouvelle harmonie ? Sans doute
Hor veste corpo
e articola gl’accenti, L’Idée
s’incarne-t-elle et articule les accents,
E organizzato un
misto d’elementi, Et
organisant de multiples éléments,
Rende in terra sensibile
una dea ? Rend
sur terre sensible une déesse ?
Qual celeste
magia, ch’incanta e bea, Quelle
céleste magie qui enchante et émerveille,
Per gorgheggiar le glorie,
adopra i venti ? Pour faire roucouler
la gloire, fait usage des vents
Ch’una lingua
canora i suoi concenti Qu’une
langue qui chante pût déifier
Deificar
potesse, io non credea. Ses
concerts, je ne pouvais le croire.
Cedano a sì bel
canto le sirene ; Que
les sirènes succombent à un si beau chant ;
L’alma, ch’ode
costei, temperie muta : L’âme
qu’elle entend change de climat,
Per eternarsi in
bocca, aria diviene. Pour
s’éterniser en bouche, devient air.
Da voce tanto
dolce e tanto acuta, D’une
voix si douce et si aiguë
L’invidia mor e
lo stupor isviene, L’envie
se meurt et la stupeur s’évanouit,
E in estasi per
sè la lode è muta. Et,
en extase devant elle, la louange se tait.
Vanità
d’humane grandezze
Huom forsennato, ahi, qual follia t’induce
A bramar statue,
a sospirar colossi :
Un momento a
gran pena viver puossi :
La vita e il
lampo hanno la stessa luce.
Tutte le
rimembranze in sè traduce
L’oblio, che
gl’archi e gl’obelischi ha scossi ;
Gl’anfiteatri,
da l’età percossi,
Son polvi, in
cui vil titolo riluce.
A che vigilie
impieghi e ti consumi :
Tua memoria,
varcata a regni bui,
Ombra non
lascierà de’ tuoi costumi.
Se cadi tu, non
ti fidar d’altrui :
L’esser è un
nulla ed i respir son fumi ;
E il marmo
esprime inutilmente un fui.
Vanité des grandeurs humaines
Homme insensé,
ah ! quelle folie te conduit
A désirer des
statues, à vouloir des colosses :
On ne peut vivre
à grand-peine qu’un instant :
La vie et l’éclair
ont la même lumière.
Tous les
souvenirs traduisent en eux-mêmes
L’oubli, que les
arcs et les obélisques ont secoué ;
Les amphithéâtres,
ébranlés par l’âge,
Sont des
cendres, dans lesquelles luit un vain titre.
A quelles
veilles t’emploies-tu et te consumes-tu :
Ta mémoire,
franchissant les royaumes obscurs,
Ne laissera aucune
ombre des tes actes.
Si tu tombes, ne
te fie à personne :
L’être est un néant
et son souffle une fumée ;
Et le marbre
exprime inutilement un « je fus ».